Des tensions relationnelles justifient une réaffectation
L’affectation des fonctionnaires est une compétence propre de l’employeur local (art. L. 512–23 du CGFP). Même sans être une mesure d’ordre intérieur, une réaffectation est légale si elle est prononcée dans l’intérêt du service, notamment pour mettre fin à un conflit relationnel (CE n° 253942 du 11 juin 2004).
Elle serait à l’inverse une sanction déguisée si l’atteinte portée à la situation professionnelle de l’agent (élément objectif) procédait d’une intention de l’employeur (élément subjectif), sur la base d’un grief formulé contre lui (concl. sous CE n° 8397 M. C du 9 juin 1978 citées par le rapporteur sous CE n° 372624 Mme B du 25 septembre 2015).
Selon cette même jurisprudence, la mesure prise à l’égard d’un agent public qui, par ses effets, ne peut pas être regardée comme lui faisant grief, est une mesure d’ordre intérieur insusceptible de recours. Présente ce caractère, celle qui, modifiant son affectation ou ses tâches, ne porte pas atteinte aux droits et prérogatives qu’il tient de son statut ou à l’exercice de ses droits et libertés fondamentaux, ni n’emporte perte de responsabilité ou de rémunération. Un recours, sauf à ce qu’elle traduise une discrimination, est irrecevable, même si elle est prise pour des motifs tenant au comportement de l’agent.
Dans l’affaire, la réaffectation diminuant les responsabilités de l’adjoint technique, elle ne constitue pas une mesure d’ordre intérieur.
Mais l’altercation avec le second de cuisine en présence d’autres collègues a pour origine une allusion maladroite à des échanges confidentiels du responsable avec l’une des employées présentes, concernant des gestes particulièrement déplacés envers le personnel féminin, l’adjoint technique estimant qu’ils pouvaient être qualifiés de harcèlement ou d’agression sexuelle.
Dans ces conditions, l’intérêt du service exigeait de séparer durablement le responsable de son adjoint.
Si le maire a envisagé une sanction contre lui avant d’y renoncer, c’est en raison de son manquement à la confidentialité des échanges avec la femme. L’absence, sans doute regrettable, de mesures contre le second de cuisine ne pèse pas davantage sur la légalité de la réaffectation.
CAA Lyon n° 21LY01774 M. A du 23 février 2023.
Le fonctionnaire est tenu d’accepter l’affectation correspondant à son grade. Il est seulement en droit d’exiger un emploi qui corresponde aux fonctions que son grade lui donne droit à exercer. En refusant une affectation, le fonctionnaire commet une faute qui, le cas échéant, peut être constitutive d’un abandon de poste.
Si le fonctionnaire ne peut pas refuser une affectation correspondant à son grade, il peut contester devant le juge la mesure modifiant son affectation lorsque celle‑ci ne constitue pas une mesure d’ordre intérieur, c’est‑à‑dire si elle correspond à ce que la jurisprudence désigne par une « mutation », parce qu’elle modifie de façon suffisamment importante les conditions de travail.
Paul DURAND
Pierre-Yves Blanchard le 05 mars 2024 - n°1849 de La Lettre de l'Employeur Territorial
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