L’absence de harcèlement n’exclut pas l’imputabilité au service d’une dépression
La maladie figurant sur un tableau du régime général, contractée dans les conditions qu’il fixe, est présumée imputable. Peut aussi l’être celle dont le fonctionnaire établit qu’elle est essentiellement et directement causée par les fonctions et a entraîné une incapacité permanente d’au moins 25 % (articles L. 822–20 du CGFP, L. 461–1 et R. 461–8 du code de la sécurité sociale).
Elle doit présenter un lien direct avec les fonctions ou des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie, sauf fait personnel de l’agent ou circonstances particulières (CE n° 437254 du 22/10/2021).
Un expert psychiatre missionné par l’université conclut, en janvier 2020, à un lien avec son activité professionnelle, et un expert, en mars, à l’apparition du syndrome dépressif concomitamment à la dégradation de ses conditions d’emploi. Le médecin du travail confirme une dépression réactionnelle contractée en service.
Entre 2015 et 2019, les relations avec son supérieur se dégradent, même si le syndrome anxiodépressif n’est diagnostiqué qu’en juin 2018 et, en l’absence d’agissements de harcèlement moral ou de violences sexuelles et sexistes, la pathologie résulte de la dégradation de la relation de travail. L’université reconnaît qu’elle est notamment imputable à une surcharge de travail consécutive à l’attribution de missions accordées à son binôme, ainsi qu’à la maladresse managériale de son supérieur qui la tutoie malgré son souhait de ne pas l’être, et a largement diffusé une note mettant en cause sa responsabilité dans les dysfonctionnements du système d’information qu’elle devait administrer.
Dans ces conditions, l’imputabilité de sa maladie est établie et le président de l’université ne pouvait pas la refuser.
Cette décision met utilement l’accent sur le fait que le mal-être au travail, s’il est rarement constitutif de harcèlement moral en raison des conditions requises par la jurisprudence pour son établissement, peut néanmoins conserver un lien avec le service et justifier l’attribution d’un congé pour invalidité temporaire imputable au service (CITIS).
CAA Marseille n° 23MA02825 Mme F du 16 septembre 2024.
Pour réagir efficacement face au harcèlement, il faut d’abord être capable de le détecter. Certains signes doivent alerter : une communication devenue hostile avec son responsable ou ses collègues (reproches incessants, remarques désobligeantes...), un isolement progressif du reste de l’équipe (plus convié aux réunions, tenu à l’écart des informations...), des tâches dévalorisantes ou des objectifs irréalistes fixés de manière arbitraire... Ces agissements toxiques ont souvent un effet direct sur la santé : troubles du sommeil, anxiété, fatigue chronique, perte de confiance en soi pouvant aller jusqu’à la dépression.
À noter : certaines catégories de salariés sont plus exposées au harcèlement moral :
- les femmes, qui représentent 70 % des victimes ;
- les jeunes de moins de 30 ans en début de carrière ;
- les travailleurs précaires (CDD, intérim, temps partiel...).
Attention à ne pas confondre harcèlement et burn out.
Paul DURAND
Pierre-Yves Blanchard le 08 juillet 2025 - n°1912 de La Lettre de l'Employeur Territorial
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