Les représentants syndicaux restent assujettis à une obligation de réserve
La portée de cette obligation varie selon les responsabilités des agents et le contexte, un représentant syndical disposant de davantage de latitude. Mais cette seule circonstance ne supprime pas sa responsabilité, le droit syndical devant se concilier avec la discipline nécessaire au bon fonctionnement du service public (CE n° 111790 office public d’HLM de la communauté urbaine de Lille du 27 mai 1991).
Dans une affaire (CE n° 426569 Mme B du 27 janvier 2020 et concl), le maire exclut 2 jours, le 7 avril 2015, une adjointe administrative de 2e classe représentante du personnel au comité technique. Avec une de ses collègues élues, à la 1ère réunion du comité en janvier 2015 après les élections professionnelles, elle tient des propos agressifs à l’encontre de la DGS qui assiste à la réunion comme expert. Les témoignages d’un autre représentant, de l’adjoint au maire, du président du comité et le compte-rendu de la réunion montrent qu’elle s’est violemment opposée à sa présence, tenant au long de la réunion des propos irrespectueux et agressifs, en dépit des invitations du président à un comportement courtois. Affectée par la violence des propos, la DGS quittera la réunion avant son terme.
Pour la représentante syndicale, en l’absence de caractère injurieux ou diffamatoire, ses propos n’étaient pas fautifs.
Des propos excessifs justifiant une sanction
Mais, pour le rapporteur public, cette analyse est à contre-courant de la jurisprudence, qui ne dispense pas les représentants syndicaux de l’obligation de réserve. Les infractions d’injures ou de diffamation ne constituent donc pas la seule limite à la liberté d’expression du représentant syndical et, sans être une infraction, des propos violents peuvent excéder les limites de la liberté d’expression syndicale.
En matière disciplinaire, le contrôle normal du juge, sur la question de la proportionnalité de la sanction à la faute, outre la qualification juridique des faits (CE Ass. n° 347704 M. A du 13 novembre 2013), présente un caractère un peu distinct en cassation. Si le contrôle ne s’attache pas à la constatation et à la caractérisation des faits, sauf dénaturation, il porte sur leur caractère fautif dans le cadre d’un contrôle de qualification juridique. S’agissant de la proportionnalité de la sanction, le juge de cassation ne remet en cause l’appréciation des juges du fond que si la sanction est hors de proportion avec les fautes (CE n° 376598 la Poste du 27 février 2015).
Dans l’affaire, les 2 syndicalistes n’ont pas seulement contesté la présence de la DGS à la réunion, mais ont adopté dès le début une attitude très agressive, ne lui laissant pas dire un mot, parlant d’elle de façon méprisante à la 3e personne du singulier comme si elle n’était pas là. Leurs propos semblaient davantage viser la femme elle-même que sa fonction et ils n’ont cessé qu’au départ, en pleurs, de la directrice générale.
Le Conseil d’État rappelle donc que si les agents publics exerçant des fonctions syndicales bénéficient de la liberté d’expression particulière qu’exige l’exercice de leur mandat et la défense des intérêts des personnels qu’ils représentent, ils doivent concilier cette liberté avec le respect de leurs obligations déontologiques. Des propos ou un comportement agressif à l’égard d’un supérieur ou d’un autre agent sont ainsi susceptibles d’avoir le caractère d’une faute de nature à justifier une sanction, même s’ils ne sont pas constitutifs d’une infraction pénale. Le juge valide donc le principe de la sanction et l’exclusion.
Pierre-Yves Blanchard le 07 juillet 2020 - n°1682 de La Lettre de l'Employeur Territorial
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